Chapitre 4 : Derniers jours sur le vieux continent

Chères familles, chers amis,


Nous vous écrivions la dernière fois depuis la Slovénie après quelques jours passés en Italie. Nous vous écrivons à présent depuis Istanbul où nous avons établi notre quartier général au consulat français, rien que ça ! Entre ces deux lettres, nous avons donc parcouru les routes de la Croatie, du Monténégro, de l’Albanie puis de la Grèce avant de traverser le détroit du Bosphore, frontière symbolique entre l’Occident et l’Orient. Sans être encore la pleine aventure, l’Europe nous aura offert un cadre idéal pour prendre en main nos 125 (rappelons que nous sommes partis depuis 26 jours et que nous avons le permis depuis … moins d’un mois) ! Vous retrouverez dans ces quelques lignes un bref résumé de notre séjour européen ! 


Notre traversée du vieux continent aura été marquée par de nombreuses rencontres. Malgré la proximité géographique et culturelle, nous avons eu notre lot de rencontres atypiques, ponctuées par des échanges via google traduction ou par de simples gestes. 

Des rencontres inoubliables

Les sœurs de Dubrovnik – RVLM (1-0)


L’accueil pour la nuit nous ayant été refusé par deux fois en Croatie, nous sommes arrivés à Dubrovnik inquiets quant à notre capacité à convaincre un Croate de nous héberger. Dubrovnik est une ville médiévale et balnéaire très touristique, connue pour ses décors prêtés à la série Games of Thrones. L’idéal pour nous est de trouver un lieu où nous pouvons dormir et laisser les motos en toute sécurité pour nous permettre de visiter librement la ville. Dans ces cas-là, nous ne visons pas trop les maisons familiales, mais plutôt les communautés religieuses, qui nous permette d’être héberger et d’avoir une soirée pour nous reposer pleinement et travailler. 

Alors que PE passe un énième entretien en visioconférence, Antoine et moi nous rendons au Couvent des Servantes de la Charité pour nous renseigner. Les deux sœurs qui nous accueillent ne parlent pas un mot d’anglais, et nous, pas un mot de croate. L’affaire s’avère compliquée. Malgré tout, nous essayons de leur faire comprendre que nous faisons France – Vietnam à moto, et que nous cherchons un lieu où dormir. Elles nous répondent en croate, et nous distinguons vaguement des mots familiers pour nous : « … France … Croatie ». Spontanément, et avec beaucoup d’entrain (voire un léger orgueil)  nous répondons : « Oui, oui ! France – Croatie en 10 jours à moto ! » Nous étions bien loin du compte. Elles nous miment avec les mains 2 et 0. La veille, la France avait perdu 2-0 au foot contre la Croatie… En fait, elles se moquent de nous. À ce moment-là, Antoine et moi pensons repartir bredouilles. Pour faciliter les choses, nous arrêtons un passant pour faire la traduction entre l’anglais et le croate. Finalement, et sans trop de négociation, elles acceptent de nous accueillir ! Mais rappelez-vous : à ce moment-là, nous ne sommes que deux, PE est en entretien quelque part dans Dubrovnik. Nous leur disons donc que le troisième arrive, et là… c’est le drame. Panique sur leurs visages. A priori, passer de deux à trois hôtes pose un grave problème ! Nous nous regardons avec Antoine et on se dit que PE peut bien rester sur son banc, il ne saura jamais où nous retrouver… Finalement, tout est bien qui finit bien : nous serons bien accueillis tous les trois.


Course poursuite avec le Père Marjane sur les routes albanaises 


Après avoir furtivement traversé le Monténégro, le passage à la frontière albanaise nous fait arriver dans le district de Shkodër, dans le nord-ouest du pays. L’ambiance générale et l’agitation en ville laissant quelque peu à désirer, nous nous demandons avec un peu d’inquiétude où est-ce que l’on pourrait bien passer la nuit.  Vous vous rappelez le couvent de Dubrovnik ? Eh bien on se dit que c’est un bon filon et l’on décide de se rapprocher de la cathédrale. L’Albanie est un pays majoritairement musulman (plus de 60%), mais des communautés catholiques et orthodoxes y sont bien présentes.

En marchant vers la maison paroissiale, PE aperçoit un col romain : il sent le bon plan et se dirige directement vers le prêtre. Ce prêtre, c’est le père Marjane. Il a monté une troupe de Scouts d’Europe dans sa région, alors quand il apprend que nous faisons partie du mouvement, il est ravi ! Ça sent bon pour l’accueil, tout ça !

Père Marjane nous propose de nous héberger dans sa maison, à vingt minutes de la ville. Lui en voiture, nous à moto. Oubli de notre part ou inconscience de sa part, il n’a pas réalisé que nous étions en 125, c’est-à-dire limités dans en termes de vitesse.  On se lance dès lors dans une espèce de course-poursuite sur les routes albanaises :  Il conduit vite, très vite, avec un respect albanais du code de la route. S’il nous distance tout est perdu car nous n’avons pas son numéro. Nous avons une petite pensée pour nos parents qui devraient recevoir très prochainement des PV en albanais (et très probablement en italien et en croate si l’on en croit nos pointes de vitesse sur les routes de campagnes …). 

Finalement, nous arrivons tout de même à bon port et nous passons une soirée excellente : pizzas, bières, et raki (alcool local), le tout accompagné d’anecdotes historiques sur le pays : la soirée est excellente. S’il y a bien un langage que nous comprenons et qui est bel et bien international, c’est celui de l’alcool ! Nous offrons alors au Père une petite fiole de Chartreuse que nous avons rapporté de France et dont le stock devrait, nous l’espérons, tenir jusqu’au Vietnam. Le lendemain, nous le suivons à nouveau pour assister à sa messe dominicale dans une petite paroisse non loin de sa maison. 


L’Albanie est pays marqué par des années de communisme, et les politiques économiques mises en place par les gouvernements qui se sont succédés ont très peu bénéficié au peuple albanais. Une fois n’est pas coutumes, le communisme a détruit la majorité des édifices religieux du pays, chrétiens comme musulmans, alors la plupart des lieux de cultes sont d’un style moderne. Nous avons été très marqués par l’état délabré des routes et des logements ainsi que la grande précarité des habitants. Néanmoins, nous retenons davantage les sourires qui nous étaient adressés par ces paroissiens et la générosité du Père Marjan. Ce fut un des meilleurs accueils que nous avons reçu depuis notre départ.


La dolce vita italienne en Albanie : Don Ignacio et Sista Laura


Pour notre deuxième et dernière nuit en Albanie, nous sommes attendus à Korçë par Don Ignacio et Sœur Laura, deux contacts que nous avons eu grâce au père Marjane. Et heureusement ! Nous avons roulé toute la journée sous la pluie, avons affronté les routes albanaises dont nous n’avons pas fini de compter les cratères (et le mot est faible) et sommes complètement trempés.

En arrivant en ville et pendant un moment, Don Ignacio ne donne pas de nouvelles, ce qui commence à nous inquiéter. Finalement, c’est Sœur Laura qui nous ouvre et nous passons un très bon moment avec elle en attendant le Père.

Quand Don Ignacio arrive, il dit tout naturellement : « Ah, je vois que vous avez rencontré ma femme ! » C’est un prêtre jeune,  dynamique (oui, on a encore des restes du vocabulaire d’école de commerce…) et vraiment drôle.

Pour la nuit, nous profitons des 100 m2 de l’appartement paroissiale (toujours un bon filon les paroisses), où nous pouvons faire sécher nos affaires.


Alexander ou la bonté orthodoxe 


Sur le chemin du Mont Athos, nous faisons un arrêt au monastère de Kakovo, une dépendance du monastère d’Hilandar, très connu chez les Orthodoxes serbes. Nous y rencontrons Alexander, un Serbe d’une trentaine d’années qui vient travailler ici trois mois par an. En Serbie, il étudie la théologie et la philosophie, et connaît un grand nombre de philosophes, écrivains et poètes français. En se remémorant nos cours de prépa, nous avons pu nous mettre à son niveau ! 

Avant même de comprendre quel était l’objet de notre venue, nous sommes invités à prendre un café, des loukoums et un shot de raki dans la « guest house ». Le moment est hors du temps. Nous sommes accueillis comme des hôtes attendus, mais la barrière de la langue rend les échanges plus compliqués. Cela dit, les regards et les gestes suffisent, et nous passons un très bon moment. A ce moment-là, seulement Antoine et moi sommes présents. Où est PE ? En ville, dans un café pour profiter d’une connexion pour passer un énième entretien. 

Tant bien que mal, nous arrivons, dans un anglais approximatif, à faire comprendre que nous cherchons un endroit où dormir. Alexander nous répond qu’il y a des chambres, mais qu’il doit attendre l’autorisation du père Nicolas, qui arrivera pour les vêpres à 20 h. Il est à ce moment-là 18h. Le temps est long étant donné que nous parlons peu et que nous nous soumettons (assez volontairement nous devons l’avouer) à la boisson locale, le raki… Nous restons donc là à échanger un peu et l’heure des vêpres finit par arriver. A l’arrivée du Père Nicolas, les deux échangent quelques mots, ils parlent de nous. Finalement, après quelques phrases, le père Nicolas se tourne vers nous, le sourire aux lèvres, et nous dit un grand « OUI ».

Parfait ! À nouveau, un accueil incroyable : lits, douches, dîner, tout ce qu’il faut. On nous offre même un livre sur la pensée orthodoxe et une icône du monastère pour nous protéger. 


Des photos en veux-tu ? En voilà !

Cliquez sur les photos pour en savoir plus ! 

Nos anecdotes croustillantes

Ça nous a régalé...

Nous avons été plus gâtés en Croatie : quasiment que du soleil (seul pays où nous n’avons pas eu de pluie) et des routes superbes. Nos nombreuses années de permis moto ne nous avaient jamais offert de telle routes pour profiter ! Un vrai régal de conduire dans ces conditions ! 

Nous devons être honnêtes avec vous : pour trouver un logement, on triche un peu depuis plusieurs jours. Vous l’avez peut-être remarqué dans nos rencontres mais désormais, notre stratégie c’est de viser les monastères pour y dormir le soir.

Aiguebelle, les sœurs à Dubrovnik, le père Marjane, Don Ignacio, un premier monastère orthodoxe vers les Météores, le monastère de Kakovo, les sœurs orthodoxes pour notre dernière nuit en Grèce… ça fait beaucoup ! Mais à chaque fois, l’accueil est généreux et sincère. Nous avons des lits, une douche, un repas : c’est presque trop facile.

Comme on aime à le dire, on va du plus familier au plus général : au début nous visions les catholiques, puis les chrétiens. À partir de la Turquie, ce sera les monothéistes, et une fois arrivés en Asie… tous ceux qui croient en quelque chose !

Le Mont Athos est une péninsule grecque abritant des communautés monastiques orthodoxes autonomes, où seuls les moines, et les hommes de plus de 21 ans, sont autorisés à entrer. Pour y accéder, il faut obtenir un Diamonitirion (une sorte de visa), présenter son passeport et prendre un ferry, unique voie d’accès au territoire.


Sur le bateau, PE sympathise avec deux prêtres orthodoxes bulgares : le père Siméon et le père Longuinus. Ce sont des habitués des lieux, et ils nous aideront à nous repérer une fois arrivés à bon port.


Après deux heures de bateau, nous accostons et, comme convenu, retrouvons les deux prêtres. Ils se dirigent vers leurs valises, et alors que nous allions leur proposer notre aide, ils nous font un signe de la main… pour qu’on vienne porter leurs affaires.


On comprend mieux pourquoi ils nous ont si gentiment proposé leur aide sur le bateau… Donnez, et vous recevrez.

L’accès au monastère que nous voulions visiter est fermé ce jour-là, et nous ne pouvons pas aller jusqu’à Simono Petra. Pour cette première nuit, nous dormons donc vers Karyès.

Ce premier échec ne nous décourage pas. Le lendemain, nous marchons jusqu’à Simono Petra pour tenter d’être accueillis. Il fait beau, la route est magnifique, et le monastère l’est tout autant ! Il surplombe la falaise, dominant, imposant — difficile de croire qu’il date du XVe siècle.


Un moine qui parle français nous accueille. Comme d’habitude : eau et loukoums à disposition. Il nous fait visiter les lieux, et franchement, ça n’a rien à voir avec ce que nous avions vu la veille. Si, hier, tout semblait touristique et commercial, ici, nous sommes vraiment en retrait, plus isolés, plus authentiques.


Malheureusement, nous ne pourrons pas dormir sur place. Alors, nous poursuivons une heure de plus jusqu’au monastère Gregoriou, situé en bord de mer, où nous serons finalement accueillis… sans même avoir réservé.

En Croatie dans un bar, sur un banc au bord de mer, dans un café en Grèce… rien ne nous arrête. Quand nous avons un entretien en visio, on le fait, peu importe l’endroit.

On espère juste ne pas devoir se lever au milieu de la nuit pour en faire un, quand le décalage horaire sera trop important.

Après une super journée de route en Croatie — il fait beau, tout roule — nous décidons de bivouaquer pour la nuit.

Notre terrain de jeu : une colline balayée par le vent, où des dizaines d’éoliennes sont installées. Il a fait très froid, mais le lieu en valait largement le coup.

... ça nous a fait pleurer (cliquez dessus pour plus d'infos !)

Si es routes nous ont régalés, l’architecture des villes croates que nous avons traversées laissait vraiment à désirer. Peu de couleurs, peu d’harmonie, peu de cachet… bref peu de choses mises en valeurs tout au long de notre aventure croate. 

À part les accueils plus que chaleureux que nous avons reçus lors de nos deux nuits en Albanie, le pays ne nous a pas vraiment séduit.

Des frontières où le passage était plutôt anarchique, de la pluie, des routes moyennement entretenues, et des conducteurs assez véhéments… On n’a pas vraiment pris de plaisir. L’héritage communiste fait décidemment naître en nous peu d’émerveillement. Néanmoins, on nous a beaucoup parlé de la côte albanaise, qui offre des paysages biens plus grandioses ! 

Un point sur lequel nous n’avons vraiment pas eu beaucoup de chance : la météo.

La parenthèse ensoleillée de la Croatie n’a pas duré, et jusqu’à présent, les jours sans pluie se comptent sur les doigts des deux mains…

En Grèce, nous sommes passés par les Météores. Quel lieu exceptionnel. On ne sait pas comment ces immenses barres rocheuses ont surgi de la terre, ni comment des hommes ont pu bâtir des monastères à leur sommet.

 

Pour la nuit, nous trouvons un spot de bivouac incroyable, en plein cœur des Météores. Probablement en toute illégalité, ce qui nous laissait dire que peu de personnes avant nous avait pu avoir la chance d’y planter sa tente. Tout annonce une belle soirée.

PE reste sur place pendant qu’Antoine et moi partons chercher à manger.

Mais en rentrant… PE a bougé. Il n’est plus là.

 

Nous ne le savons pas encore, mais il vient d’être attaqué par une meute de chiens errants. Après une fuite à moto assez épique, il a préféré changer de lieu pour la nuit.

Le nouveau spot ? 4m2 derrière un générateur électrique. Mais bon… on s’en contentera.

Je ne l’avais pas précisé dans la première anecdote sur le Mont Athos, mais si nous n’avons pas pu dormir à Simono Petra, c’est surtout parce que, une fois de plus, nous n’avions rien prévu… donc pas réservé.

 

En arrivant, sans confirmation de logement, nous ne pouvons pas rester à Simono Petra. On nous accompagne alors en voiture jusqu’à Karyès, une sorte de “capitale” du Mont.

Une fois sur place, nous allons frapper à un monastère pour y trouver de quoi dormir. Même question que d’habitude : “Avez-vous une réservation ?”. Même réponse : non.

On attend. Puis, après vérification de nos papiers, un moine nous appelle et nous demande de le suivre… jusqu’aux cuisines.

 

Antoine, optimiste, pense qu’on va nous offrir les restes du déjeuner. Il est loin du compte.

Nous sommes en fait attendus pour une petite corvée : éplucher 60 kg patates.

On est six “punis”. 10 kilos chacun.

Une fois la tâche terminée, on a juste le temps de faire un petit tour en ville… avant qu’il ne soit déjà l’heure du dîner.

Oui, à 16 h. Dîner en silence avec les moines, on commence à avoir l’habitude. Puis, nouvelle mission : passer la serpillière dans l’église.

Décidément, on aurait peut-être dû réserver… Ou être orthodoxes on ne saura jamais.

Pour mener à bien ce projet nous devons trouver des sources de financement, nous avons donc lancé une cagnotte.

Merci pour votre préciseuse aide. 

Sans parrains, notre projet n’aurait pas de sens ! On compte sur vous pour entrer dans l’aventure en parrainant ou en parlant autour de vous. 

Objectif 40 parrains !

Leave a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *

×